lundi 20 mai 2013

Trahisons des Serbes au Bataille du Kosovo

Instruit de cette invasion, Amurath vola au secours du despote son allié, empêcha la jonction de Corvin et de Scanderbeg , et rencontra l'armée hongroise dans la plaine de Kossova, illustrée cinquante-neuf ans auparavant par la victoire et par la mort d'Amurath Ier en 1389 dans le champs de bataille par un certin Milosao di Cobilichi, un dardaniens.

Les derniers Césars de Byzance
Par Louis Phocion TODIÈRE

                            HUNIADE  et  SCANDERBEG



— Paix de Segeddin, bientôt violée par les chrétiens. —Bataille de Varna. — Amurath tiré de sa retraite de Magnésie parla révolte des janissaires. — Ravage et conquête du Péloponèse. — Bataille de Kossova. — Fuite et dangers de Jean Huniade. — Défection et succès de Scanderbeg. — Amurath forcé de lever le siége de Croïa. — Mort de Jean H Paléologue. — Démétrius dispute le trône à son frère Constantin Xll Dragosès, empereur de Constantinople. — Mort d'Amurath II. — Ambassade de Phranza. — Situation de la cour de Byzauce.

Eu attendant que la vengeance divine portât le dernier coup à l'empire de Byzance, Amurath, maître de la Servie et soutenu par le despote de Valachie, marchait contre les Hongrois, de nouveau troublés par la mort subite d'Albert (1439). Les uns appelaient au trône le roi de Pologne, Ladislas, à condition qu'il épouserait la reine Élisabeth ; d'autres, avant de prendre un parti, voulaient attendre les couches d'Élisabeth. Lorsqu'elle eut donné le jour à Ladislas le Posthume, la reine, obéissant à des sentiments maternels et désespérant de résister aux. Polonais, fit couronner précipitamment son fils à Albe - Royale, et s'enfuit en Autriche avec le jeune prince et la couronne de saint Étienne. Alors commença une guerre civile qui dura plus de quatre ans. Amurath en profita pour assiéger Belgrade, le premier boulevard de la chrétienté catholique, et il confia le commandement de cette expédition au fils d'Ewrenos, Alibeg (1440). Celui-ci entoura la place de machines de toute espèce propres à lancer des pierres, de terrasses, et de cent vaisseaux sur le Danube. Le sultan ne savait pas que la Hongrie ne lui avait pas été livrée. Toujours et partout victorieux, il avait jusque alors marché rapidement à son but, en renversant tous les obstacles opposés à son ambition. Mais devant Belgrade sou étoile devait pâlir pour la première fois. Son lieutenant trouva un digne adversaire dans le prieur Zo\van de Raguse. -La ville répondit avec succès aux attaques réitérées des assiégeants par le feu bien nourri des remparts et le jeu des mines. Le Polonais Lenzicyky parut comme envoyé du roi de Pologne pour demander au sultan de mettre un terme au blocus qui durait depuis six mois. Amurath, qui devait bientôt se retirer, répondit néanmoins avec orgueil que tôt ou tard il ferait la conquête de Belgrade.

La résistance vigoureuse de Belgrade fut le prélude des défaites successives que fit éprouver aux Musulmans le célèbre Jean Huniade, connu d'eux sous le nom A'Yanko (en turc, écho). Jean Corvin, seigneur de Huniade, était un magnat renommé par sa bravoure, à laquelle il devait son élévation. Issu d'une noble famille de Transylvanie selon les uns, et selon d'autres né d'un Valaque et d'une Grecque, il avait d'abord commandé douze cavaliers à la solde de l'é- vêque de Zagrad; ensuite il avait accompagné Sigismond en Italie, et servi dans l'armée de Philippe-Marie Visconti. Il paraît qu'à son retour en Hongrie il reçut de Sigismond la seigneurie d'Huniade, située sur les frontières de la Transylvanie et de la Valachie. Il fit ensuite une campagne eu qualité de centurion ou de capitaine, sous le préfet hongrois de Halle. Il accrut ses possessions en épousant une femme riche et d'une naissance illustre. Enfin il était devenu woïé- vode de Transylvanie, quand Ladislas entra en Hongrie. Il se déclara pour ce prince, qui eut à défendre son nouveau royaume contre Élisabeth d'une part et les Turcs de l'autre. Sous le titre modeste de Chevalier-Blanc de Valachie, il acquit une renommée brillante. Dans leur admiration, les Hongrois lui appliquaient ces paroles de l'Évangile fut m homme envoyé de Dieu, qui s'appelait Jean.

Les Turcs retrouvèrent dans ce héros une terreur puissante comme au temps des croisades; ils l'appelaient le Diable, et se servaient de son nom pour effrayer les enfants indociles. Ils ne purent jamais pénétrer dans le royaume dont il était le gardien, et ils pleurèrent sa mort, qui laissait à jamais impunies les grandes injures qu'il avait imprimées à leur orgueil. Le guerrier chrétien délivra la Hongrie de la discorde civile et de la guerre étrangère : dix fois il combattit les infidèles en bataille rangée; quatorze fois il les prit au dépourvu et les dispersa. Vaincu deux fois, Huniade ne, leur abandonna la victoire qu'après l'avoir vivement disputée. Ses brillants exploits furent une heureuse diversion en faveur de Conslan- tinople. Sans lui, non-seulement la Hongrie, mais la Bavière, mais l'Allemagne, mais toute la chrétienté semblaient perdues. Les nations orthodoxes le regardaient comme leur plus sûr rempart ; le roi de Pologne lui rendait ce témoignage, qu'il attirait sur lui tous les regards, sans exciter l'envie (l). Les papes lui envoyaient des ambassadeurs comme à un roi.

Cependant Mezidbeg, grand écuyer du sultan, franchit à son tour la Valachie, pénétra dans la Transylvanie (18 mars 1442), et alla mettre le siége devant Hermanstadt. Excités à la guerre par le despote de Servie et son fils Lazare, qui s'étaient réfugiés à Raguse après la mort d'Albert, puis en Hongrie, Ladislas et Huniade résolurent d'attaquer les Turcs. Huniade marcha donc avec de vaillantes troupes au secours dela ville assiégée, et fit éprouver une déroute complète aux Ottomans, dont vingt mille restèrent sur le champ de bataille. Le pacha s'enfuit avec ses cavaliers, et fut massacré ainsi que son Bis. Huniade, qui n'avait perdu que trois mille hommes, passe les montagnes, entre en Valachie, et ravage les deux rives du Danube. Reçu en triomphe par ses concitoyens peu accoutumés à de pareils succès contre les Turcs, le général hongrois envoie à Georges Brankovich, comme trophée de sa victoire, un char si pesamment chargé de dépouilles ennemies, que dix bœufs pouvaient à peine le traîner. Les tètes de Mezidbeg et de son fils couronnaient le sommet, et au milieu était assis un vieux Musulman, qui fut obligé d'offrir ces tristes dépouilles au despote de Servie.

Pour venger cette défaite, Àmurath prépara une invasion formidable, et donna ordre à Sciabadin-Pacha de marcher contre le vainqueur avec l'élite de ses janissaires et une armée que Bonfinius porte à quatre-vingt mille hommes. 11 devait aussi châtier les Valaques et les Moldaves, que le Chevalier-Blanc avait détachés de l'alliance des Ottomans. L'orgueilleux Sciahadin se vantait qu'au seul aspect de son turban les ennemis s'enfuiraient à plusieurs journées de distance. Huniade s'avança contre lui jusqu'à Vasag avec quinze mille hommes seulement, mais déterminé à vaincre ou à mourir. Le brave Hongrois répondit à la jactance du pacha par un triomphe plus éclatant encore que sa première victoire, grâce à l'avantage que lui donnaient sur la cavalerie légère des Turcs ses cavaliers armés de lourdes lances et couverts de fer. Sciabadin fut pris avec cinq mille des siens et deux cents étendards. Les meilleurs officiers d'Amurath trouvèrent la mort dans la terrible journée de Vasag. Le sultan, humilié par cette nouvelle défaite, n'en demanda pas moins aux Hongrois Belgrade ou le tribut. Jean Corvin fut d'avis qu'on le punît de cette audace en attaquant ses États. Le despote détrôné de Servie poussait aussi Ladislas à la guerre, pour reprendre ce qu'il avait perdu. Ladislas, d'ailleurs, qui commandait aux armées hongroises et polonaises , voulait mettre son règne à profit en tournant de si grandes forces contre l'ennemi commun.

L'année suivante (1443) fut remarquable par la rapidité des exploits d'Huniade. Une campagne de cinq mois lui suffit pour gagner cinq batailles et s'emparer d'autant de villes; aussi, les Hongrois, fiers de ces succès, l'ont-ils nommée la longue campagne. Ce furent les débuts brillants de la croisade réunie par les efforts du cardinal Julien, légat du pape Eugène IV, qui avait sonné la cloche d'alarme contre les infidèles. Depuis la funeste bataille de Nicopolis, jamais tant de nations diverses de l'Europe chrétienne ne s'étaient alliées pour combattre l'ennemi perpétuel de leur foi. Des Allemands, des Polonais, des Valaques, des Serviens et des Hongrois composaient l'armée, qui partit d'Ofen le 22 juillet, et passa le Danube, près de Semendra, sous les ordres de Brankovich. Huniade, à la tête de douze mille cavaliers d'élite, entra en Servie et pénétra jusqu'à Nissa, ravageant tout sur son passage, tandis que le roi Ladislas et le cardinal Julien suivaient avec vingt mille hommes, à une distance de deux journées. Le 3 novembre 1443, les deux armées ottomane et hongroise se rencontrèrent aux environs de Nissa. Toute la bravoure des Musulmans dut échouer devant les savantes manœuvres d'Hu- niade. Amurath se vit contraint à une retraite précipitée derrière le mont Hémus, après avoir perdu deux mille hommes et laissé entre les mains de l'ennemi neuf drapeaux et quatre mille prisonniers. L'importante ville de Sophia fut conquise. La terreur avait passé des chrétiens aux Turcs ; il ne s'agissait plus que de marcher sur Philippo- polis, et de là sur Andrinople.

Un mois plus tard, le général chrétien engagea une nouvelle bataille dans les défilés du Balkan, où ses soldats . eurent à lutter non-seulement contre les ennemis, mais encore contre les avalanches et les énormes blocs de glace et de rochers qui se détachaient de la crête des montagnes. Ils furent cependant vainqueurs, et l'avantage leur resta encore dans une dernière grande bataille, la seule à laquelle le roi Ladislas assista en personne. Au nombre des prisonniers qui tombèrent entre les mains des croisés, on cite Mahmoud-Tchélébi, frère du grand-vizir et gendre d'Amu- rath. Huniade repassa ensuite le Danube avec son armée, et fit à Bude une entrée triomphale. Il y parut précédé des étendards ennemis, escorté d'un légat et du despote de Servie. Bonfinius décrit avec complaisance la joie de la Hongrie et de la chrétienté, les processions des prêtres et du peuple au-devant des vainqueurs, les actions de grâces à la sainte Vierge, patronne du royaume. Le pape Eugène, les Génois, les Vénitiens, et Philippe le Bon, duc de Bourgogne, envoyèrent des ambassadeurs à Ladislas, et Corvin eut sa part de leurs félicitations. Tous l'excitaient à continuer la guerre et lui promettaient leur secours. Jean Paléologue l'engageait aussi à une nouvelle expédition, dans l'espoir qu'elle pourrait le délivrer définitivement des Turcs, l.e despote de Servie et le cardinal Julien appuyaient sa demande, chacun dans ses intérêts particuliers. Mais les Polonais s'y opposaient de toutes leurs forces, parce que la Pologne était agitée au dedans, et au dehors attaquée par les Tartares. D'ailleurs, une partie de la Hongrie était toujours occupée par les Bohémiens, qui disaient tenir pour Ladislas le Posthume , mais désolaient de leurs brigandages les comtés du nord.

Cependant Ladislas voulait la guerre, et il chargea Cor- vin de la préparer. De son côté, le pape Eugène, de concert avec les Vénitiens et les Génois, rassemblai Gaëte soixante- dix galères, dont il donna le commandement à un cardinal florentin nommé François Gondolmieri. Cette flotte se dirigea vers l'Hellespont. Elle devait empêcher les Turcs de passer en Europe. Le prince de Caramanie avait pour la troisième fois secoué le joug; il disputait l'Asie aux Ottomans, et résistait à toutes leurs forces. Attaqué sans relâche, et fatigué d'être vaincu, Amurath pardonne au rebelle, et, voulant mettre un terme à la guerre désastreuse qu'il soutenait dans le nord-ouest de son empire, il rend au woïévode Drakul la Valachie, et à Georges Brankovich ses deux fils, auxquels il avait fait crever les yeux, et les forts qu'il lui avait enlevés. Il envoie ensuite un ambassadeur à Jean Huniade pour négocier la paix. Celui-ci en réfère à la diète rassemblée à Segeddin, et la diète cousent à traiter avec les Ottomans. On conclut une trêve de dix ans en présence du cardinal Julien, qui dévora son mécontentement (12 juillet 1444). Les sujets de Ladislas et de Georges étaient au contraire dans la joie. Amurath s'engageait à restituer à Brankovich la Servie et l'Herzegovine, à laisser la Valachie sous la suzeraineté, des Hongrois, et à payer une somme de soixante-dix mille ducats pour la rançon de son gendre. Les Turcs demandèrent le serment sur l'hostie, mais on s'y refusa. Ils jurèrent sur le Coran, les chrétiens sur l'Évangile. Le traité était écrit dans les deux langues.

Au milieu de ses négociations avec les chrétiens, une nouvelle accablante plongea le sultan dans la plus profonde douleur: son fils aîné, Alaeddin, prince doué de qualilés brillantes, venait de mourir. Amurath, qui joignait à ses talents militaires une tendre affection pour ses enfants, éprouva un tel regret de cette perte, qu'il prit la résolution de renoncer au trône. Après avoir environné son fils Mahomet , âgé seulement de quatorze ans, de ministres vieillis dans les affaires et capables de guider son inexpérience, il alla chercher le repos d'une vie jusque-là si agitée, dans l'agréable retraite de Magnésie, avec un petit nombre de favoris.

Mais tandis que le sultan, à peine arrivé au milieu de sa carrière, confiait aux mains inhabiles de son fils les rênes du gouvernement, les ennemis de l'empire ottoman veillaient, attentifs à saisir la première occasion favorable de se venger de tous les désastres que leur avaient fait éprouver les armes musulmanes. Le traité de paix était à peine signé lorsque arrivèrent les députés de la flotte croisée, assurant que l'armée des infidèles ne pouvait passer d'Asie en Europe. Ils demandèrent à Ladislas d'agir promptement. L'empereur Jean II Paléologue, craignant que la paix de Segeddin ne tournât contre son repos, sollicita du pape, des Francs, de Philippe due de Bourgogne, une nouvelle croisade qui effaçât l'affront de Nicopolis. Les Hongrois regret- taient d'avoir perdu une si belle occasion de chasser les Turcs de l'Europe, et le cardinal Julien n'était pas moins impatient de terminer la guerre contre les ennemis du Christ : aussi s'empressa-t-il de profiter de la disposition des esprits pour faire rompre le traité. Afin de mieux s'assurer de Georges, on lui promit de nouvelles possessions. Les Polonais murmurèrent, car les Russes envahissaient alors la Lithuanie.

La deuxième expédition de Bulgarie commença par le passage du Danube à Orsowa. Cette fois, instruit par l'expérience de la première campagne, on résolut de laisser en arrière les places des Turcs et de pousser droit à Gallipoli. Deux routes y conduisaient: l'une au milieu del'Hémus, directe, escarpée et difficile; l'autre, entre l'Hémus et la mer, plus longue et plus sûre. Ladislas prit la seconde, après avoir donné un assaut inutile à Nicopolis. Un chef des Valaques vint le joindre avec ses vassaux. Effrayé do petit nombre de ses troupes, il lui conseilla sagement la retraite. En effet, une fois la paix conclue, la plupart des croisés allemands et bourguignons étaient rentrés dans leurs pays. Le corps d'armée du légat était réduit à une poignée de soldats. Néanmoins Ladislas ne suspendit pas sa marche. Ses troupes ravagèrent en passant les églises grecques et bulgares, brûlèrent vingt huit navires ottomans destinés à entrer dans la mer Noire et à remonter le Danube, soumirent quelques places fortes, et vinrent camper près de Varna, ville située sur les bords de la mer, et qui ouvrit ses portes à l'armée chrétienne.

Dans ce pressant danger, Amurath avait consenti à sortir de sa solitude de Magnésie, et, indigné de la violation de la paix, il s'était élancé de l'Asie à la tête d'une armée de quarante mille hommes. Au lieu de gagner l'Hellespont, où croisait la flotte pontificale, il était venu débarquer sur les rives du Bosphore. Des vaisseaux génois avaient transporté ses troupes, moyennant la rétribution d'un ducat par homme. D'Andrinople il s'était avancé à marches forcées, et avait assis son camp à quatre mille pas de celui des Hongrois. Le cardinal Julien proposa de retrancher le camp au moyen de fossés et de barricades de chariots. Huniade et le despote de Servie s'y opposèrent, et la bataille fut résolue.

La veille de la fête de Saint-Martin (10 novembre 1444), les troupes des deux partis se rangèrent en bataille. Du côté des chrétiens les dispositions furent prises par Huniade. La bataille, engagée dès le point du jour, durait encore à la neuvième heure. Le cardinal Julien et Georges Brankovich s'élancèrent les premiers contre les Turcs. Les ennemis les repoussèrent ; mais Huniade et Ladislas rétablirent le combat, et portèrent la mort dans tous les rangs. C'est alors, dit-on, que le sultan, voyant ses janissaires plier, tira de son sein la copie du traité fait avec les Hongrois, et, levant les yeux au ciel, demanda au Dieu des chrétiens la punition du parjure. Bientôt Ladislas, emporté par sou ardeur, se précipita au milieu des janissaires. Entouré de cinq cents cavaliers, ses gardes du corps, sous la bannière de SaintGeorges, portée par Étienne de Bathori, il multiplie les prodiges de valeur et cherche Amurath dans la mêlée. Mais son cheval, blessé au pied d'un coup de hache, tombe entraînant sous lui son cavalier. Aussitôt un vieux janissaire s'approche, lui coupe la tête, la plante sur une lance, et crie avec force aux ennemis : « Voilà la tête de votre roi ! »

Cet horrible pendant d'une autre pique au haut de laquelle le sultan faisait porter le traité de Segeddin pour montrer à ses soldats ce monument de la perfidie des chrétiens, jeta la terreur dans l'armée hongroise, et fut le signal de sa défaite. Elle battit en retraite, malgré le courage que déploya Huniade afin d'arracher aux ennemis le corps du jeune roi. Le héros est lui-même obligé de céder, et, reconnaissant la vengeance divine, il part en criant aux siens: «Sauve qui peut!» Les Hongrois rentrèrent dans leur camp, après avoir perdu les deux tiers de leur armée, avec le cardinal Julien, l'auteur de ce grand désastre, et Étienne Bathori, père du woïévode de Transylvanie. Trente mille Ottomans restaient

Georges et Huniade firent repasser le Danube aux débris des croisés, qui du reste ne furent point poursuivis par les Turcs. Le deuil fut grand en Hongrie, en Pologne et dans toute la chrétienté. Le pape donna des larmes à Ladislas, et célébra en son honneur un magnifique service dans la basilique de Saint-Pierre. Le sultan voulut rendre aussi un éclatant hommage à sa valeur. Il fît élever une colonne à l'endroit où le roi de Hongrie était tombé ; mais l'inscription modeste célébrait la valeur et déplorait l'infortune de Ladislas sans blâmer son imprudence (1).

Satisfait d'avoir sauvé l'État, et fatigué du trône, Amu- rath résigna une seconde fois la couronne pour regagner ses délicieux jardins et son palais de Magnésie. Mais à peine goûtait-il les douceurs du repos, que l'empire réclama encore son sauveur. Les janissaires, révoltés, se livraient à des scènes de désordre qui portaient l'épouvante dans Andrinople. Cette terrible sédition décida les ministres du jeune sultan à solliciter la présence d'Amurath. Ce prince, sacrifiant ses goûts au vœu de ses anciens sujets, céda à leurs prières, revint à Andrinople, et remonta pour la troisième fois sur le trône. Dès qu'il eut ressaisi le sceptre, les janissaires reconnurent la voix de leur maître, et rentrèrent aussitôt dans l'ordre, tant son nom leur inspirait de crainte et de respect (1445).

A peine en possession de l'autorité souveraine, qu'il ne devait plus déposer jusqu'à sa mort, il ne détacha plus ses regards de la partie méridionale de l'ancien empire byzantin en Europe, du Péloponèse et de l'Albanie. Peu de temps après le désastre de Varna, où les Latins seuls, et non les Grecs, avaient porté la peine de cette perfidie dont Jean Paléologue avait été le premier auteur, il avait renouvelé la trêve avec l'empereur. Les États de ce dernier étaient alors limités aux dépendances de la capitale, renfermées dans la longue muraille d'Anastase. Le traité qu'il avait signé ne comprenait pas ses frères, les despotes du Péloponèse. Théodore avait été institué despote de Sparte, lors du partage de l'empire entre les fils de Manuel. Après sa mort, il avait eu pour successeur son neveu Théodore, fils d'Andro- nicus, qui ensuite échangea la possession de ses domaines avec son oncle Constantin. Ce prince, arrivé dans le Péloponèse , étendit sa domination, et se trouva bientôt maître de presque toute la péninsule, à l'exception de la part de son frère Thomas. Les progrès de Constantin, auquel était réservé le trône de Byzance, furent encore favorisés par la longue campagne d'Huniade.

Cette extension de puissance provoqua l'envie et les attaques d'Amurath. Son propre désir et les instances du beg- lerbey de Roumilie et du duc d'Athènes, Neri Acciaiuoli, qui avait rompu son alliance avec Constantin, lui inspirèrent la résolution d'en faire la conquête. Laissant donc la paix au possesseur de Constantinople, il descendit sur la Grèce centrale à la tête de soixante mille hommes 11 reçut à Thèbes l'hommage du prince florentin Neri, puis vint forcer le mur que Constantin avait achevé à l'isthme d'Hexa- milon, et derrière lequel il s'était retranché avec son frère Thomas et toutes les forces du Péloponèse (1446). Corinthe, abandonnée de sa garnison, qui s'était rendue à la défense de la muraille, devint la proie des barbares et fut livrée aux flammes. Les nouveaux vainqueurs détruisirent pour la quatrième fois les fortifications de l'isthme, et "comblèrent les fossés. La dévastation de Patras, la seconde capitale de la Morée, suivit l'incendie de Corinthe. A l'approche des Turcs, la plupart des habitants avaient pris la fuite; il en restait encore quatre mille ; ceux- ci payèrent de la liberté leur aveugle confiance. Les janissaires commencèrent par miner les murs de la citadelle, qui leur opposait une vive résistance. Mais les Grecs, versant des flots de poix fondue, les forcèrent à la retraite, puis remplirent les brèches et se fortifièrent de nouveau. Lorsque le reste de son armée arriva, le sultan leva le siége et conclut avec Constantin un traité en vertu duquel tout le Péloponèse devait être tributaire des Turcs (1). Soixante mille Grecs furent pris et emmenés en esclavage. Constantin, comme despote de Sparte, et son frère Thomas, comme despote d'Achaïe, durent payer une capitation pour tous les sujets que le vainqueur voulut bien leur laisser.

Ce ne furent pas les Grecs qui empêchèrent Amurath de consommer leur ruine après la dévastation du Péloponèse. Le sultan ne comprit pas que ses victoires n'avaient fait qu'enflammer davantage le courage des Hongrois, et qu'elles lui coûtaient trop cher pour en tirer de grands avantages. Il ne cessa point de harceler la Hongrie, comptant sur les embarras d'Huniade. Choisi pour régent j usqu'à la majorité du jeune roi Ladislas le Posthume, que Frédéric III retenait à sa cour, Huniade passa deux années à ravager l'Autriche, la Styrie, la Carinthie, et employa les deux suivantes ou à combattre les Turcs ou à pacifier la Hongrie. La sagesse de son administration prouva qu'il unissait les talents du politique à ceux du guerrier. On le voyait avec admiration rendre la justice en tous lieux, en tout temps, assis ou à cheval, et avec un tel esprit de conciliation et de prudence, qu'il mit fin aux discordes civiles. Il se montra terrible à l'empereur d'Allemagne, qui ne voulait point restituer aux Hongrois leur jeune roi et la couronne de saint Étienne, qu'Élisabeth avait remise à sa garde, aux Valaques et aux Moldaves. Au milieu de ces soins divers, il sut contenir les Turcs sur la rive droite du Danube; il les surveillait pendant le jour, et allumait de grands feux pendant la nuit afin d'éviter les surprises.

Au lieu de se borner à une guerre défensive, quatre ans après la bataille de Varna, Huniade résolut de prévenir les desseins d'Amurath. Il fit alliance avec le prince d'Albanie. Scanderbeg, et se mit à la tête de l'armée la plus belle et la mieux disciplinée que la Hongrie eût encore levée, comprenant environ vingt-quatre mille hommes, dont huit mille Valaques sous Dan, institué woïévode de la Valachie à la place de Drakul, et de,ux mille arquebusiers allemands et bohémiens. Huniade passa le Danube pour rejoindre Scanderbeg, et envahit la Servie. Le despote Georges Bran- kovich lui devait d'avoir recouvré sa principauté ; mais, effrayé de la puissance des Turcs et jaloux du guerrier hongrois, il avait refusé les auxiliaires que lui avait demandés l'armée chrétienne. Il ajouta même une trahison dans le genre grec, et dévoila au sultan les plans d'Huniade.

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